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Sylvie Bourgeois Harel  - Saint-Tropez hiver

Sylvie Bourgeois Harel - Saint-Tropez hiver

Et si nous parlions de Saint-Tropez l'hiver ?
Je suis amoureuse de Saint-Tropez. Je l’ai toujours été. Et je le suis encore plus aujourd’hui, depuis un an et demi, que j’y habite. Et je suis encore plus amoureuse  de Saint-Tropez durant l’hiver. Saint-Tropez durant l’hiver est un ravissement. Déjà, les températures méditerranéennes sont douces, il est rare de descendre en dessous de 3 degrés. C’est le temps idéal pour faire de grandes promenades. Après mes séances d’écriture, je pars marcher une ou deux heures, au bord de l’eau. J’en profite pour me baigner presque tous les jours. La mer est, certes, froide, mais pas gelée. Elle est surtout très vivifiante. Mes bains de mer, l’hiver, sont mon meilleur médicament pour booster mon système immunitaire. Mon deuxième médicament-bonheur est la lumière d’hiver. Elle est sublime. La lumière du Sud, en hiver, exalte les couleurs. Elles ne sont pas saturées, comme en été, à cause de la chaleur. Au contraire, le froid sec les amplifie, les définit. C’est ce qui me manque le plus lorsque je remonte, de temps à temps, à Paris, mon ciel bleu. Il est où mon ciel bleu ? je n’arrête pas de répéter à mes amis qui se sont tristement habitués au ciel parisien, gris et déprimant. Moi, je ne ne veux m’habituer à rien. Je veux vivre pleinement. Je veux profiter de chaque instant. Je ne veux plus me passer de mon ciel bleu et de ma lumière du Sud.

Pourtant, j’ai été une vraie parisienne à avoir une vie très festive, assez mondaine, à sortir tout le temps, à adorer les restaurants, les avant-premières de cinéma, les générales de théâtre, les dîners jusqu’au bout de la nuit. Ce que je ne retrouve pas ici, mais ce n’est pas ce que je recherche non plus. J’ai aimé Paris. J’aime toujours Paris d’ailleurs. Je suis contente d’aller y passer une ou deux semaines, comme je l’ai fait en octobre pour la sortie de mon livre, mais je suis contente de ne plus y habiter. J’ai quitté Paris sans frustration, ni ras-le-bol, juste avec l’envie de me créer une nouvelle vie.  Une nouvelle vie à Saint-Tropez dont j’ai toujours été amoureuse. Je ne l’ai pas fait avant car ce n’était pas le bon moment. L’énergie de Paris me retenait encore un peu.

C’était peut-être un leurre car ici, proche de la nature et de la mer, j’ai découvert une autre énergie. Plus profonde. Moins superficielle. Plus spirituelle. Vous allez rire en me lisant, une énergie spirituelle à Saint-Tropez ? Oui, il y a plusieurs Saint-Tropez. Chacun peut trouver le sien qui lui convient. Le mien de Saint-Tropez est spirituel. La nature qui m’entoure et que je fréquente chaque jour m’apprend beaucoup sur le sens que je donne à ma vie. Des lieux comme la Chapelle Sainte-Anne, le Monastère de la Verne, les Roches Blanches au-dessus de La Garde-Freinet où je passe tous mes week-ends dans ma maison provençale au coeur du village, sont très telluriques et chargés de magnétisme.

Alors lorsque j’entends des gens râler que Saint-Tropez est mort en hiver, je les plains de ne pas savoir apprécier toute cette richesse naturelle et cette beauté qu’ils ont autour d’eux. Ce sont d’ailleurs souvent les mêmes qui râlent en été que Saint-Tropez est trop bondé. Saint-Tropez n’est pas mort en hiver. Ainsi que je le disais à une touriste qui, l’autre jour, me posait la question sur le parking du port, vous savez madame, moi, je suis très vivante, je lui ai répondu en riant. C’est vrai quoi, la joie se trouve dans notre coeur, dans notre capacité à sourire, à rire, à s’intéresser, à apprendre, à transmettre, à contempler, à s’émerveiller, à décider de couper la télé, à fermer les journaux, à éteindre la radio. Elle ne se trouve pas dans le divertissement à outrance.

Mon divertissement à moi, c’est de me réjouir de mon ciel marine, de la mer transparente, de mon poulpe qui m’accompagne à chacun de mes bains, s’enlaçant tel un amoureux autour de ma cheville pour nager avec moi. Ce sont aussi les oiseaux, les fleurs, les arbres, les renards que je rencontre dans la forêt et qui sont pleins de curiosité à m’observer, prêts à vouloir jouer. Quand je croise un animal, je me mets en mode alpha, je respire calmement pour espacer les battements de mon coeur afin de lui transmettre des ondes de douceur, d’amour, de compréhension. Je rêve de rencontrer un loup avec sa famille. Mon autre rêve serait de leur offrir un sanctuaire pour les protéger.  

Saint-Tropez n’est pas mort en hiver. Saint-Tropez se repose. Le village se repose des excès de l’été. Il reprend des forces nécessaires tellement il y a eu de monde durant la saison. Il se répare aussi. De nombreux travaux de voirie ou de rénovation sont organisés à cette période. Saint-Tropez a évolué. Saint-Tropez est une vieille dame devenue un sorte de musée à ciel ouvert, connu du monde entier pour son authenticité. Il faut donc le ménager. Et ces trois mois d’hiver contribuent à lui refaire une beauté. À saint-Tropez, on réapprend également à vivre suivant le rythme des saisons. En hiver, on hiberne, on calme le jeu, on se retrouve le soir autour des feux de cheminée, on fait des gâteaux, on reste au chaud. C’est une période d’introspection, de réflexion, de projets.

Certes, de nombreux restaurants et de boutiques sont fermés, mais la mer reste ouverte, la plage aussi, le littoral également. Il est impossible de s’ennuyer. Et puis, pour ceux qui veulent sortir, les propositions sont suffisantes. Le cinéma Star programme trois films différents par semaine. La mairie organise régulièrement des conférences, des concerts, des spectacles. Le Café de Paris, le Clémenceau, le Sporting, le Sube, et d‘autres établissements, restent ouverts. Des orchestres sont invités les soirs de week-end. C’est très joyeux. Mon cher Sénéquier est là également. J’y vais régulièrement écrire en fin de journée avec mon ordinateur autour d’un délicieux chocolat chaud accompagné de deux madeleines. Et puis, cette année, le Tigrr Ermitage a eu la bonne idée d’ouvrir toute l’année. On peut y prendre un thé ou un champagne sur la terrasse, dès 17 heures, afin d’admirer le soleil se coucher sur la mer, puis dîner au chaud à l’intérieur, et bien sûr danser. Car Saint-Tropez est festif, quoi qu’il se passe,  quelle que soit la saison, on trouve toujours une occasion de danser !

Sans oublier les vacances de Noël qui sont féériques à Saint-Tropez avec le village totalement illuminé et le Père Noël qui arrive par la mer. Sur le port, des centaines de personnes l’attendent, les yeux remplis de joie enfantine et de leurs souvenirs familiaux. Les enfants sont sur les épaules des parents à appeler le Père Noël. Chacun achète des gaufres, des crêpes, des hot-dogs aux petits chalets en bois le long des quais. Et quand la barque du Père Noël s’amarre devant la statue du Bailli de Suffren, et que le père Noël descend tout doucement de son mat, tous en choeur, nous chantons Petit Papa Noël sur les airs de Tino Rossi.  C’est alors une véritable communion d’émotion qui se produit.

Ne me demandez pas où je serai cet hiver, je serai à Saint-Tropez » !

Sylvie Bourgeois Harel

Sébastien Peiffert - Sylvie Bourgeois Harel - Minou - Le Tigrr Ermitage hôtel Saint-Tropez

Sébastien Peiffert - Sylvie Bourgeois Harel - Minou - Le Tigrr Ermitage hôtel Saint-Tropez

Saint-Tropez l'hiver - La Ponche

Saint-Tropez l'hiver - La Ponche

Saint-Tropez l'hiver - Sénéquier

Saint-Tropez l'hiver - Sénéquier

Sylvie Bourgeois Harel - Saint-Tropez l'hiver

Sylvie Bourgeois Harel - Saint-Tropez l'hiver

Sylvie Bourgeois Harel - Saint-Tropez l'hiver

Sylvie Bourgeois Harel - Saint-Tropez l'hiver

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Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel

Saint-Tropez mon amour - La Ponche

Saint-Tropez mon amour - La Ponche

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel

Saint-Tropez mon amour - La Ponche

Saint-Tropez mon amour - La Ponche

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel - Marcelline l'aubergine

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel - Marcelline l'aubergine

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel - Marcelline l'aubergine

Saint-Tropez mon amour - La Ponche - Sylvie Bourgeois Harel - Marcelline l'aubergine

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Les samedi 17 et dimanche 18 septembre, de 10h à 19h, aura lieu la 6ème opération Dessine-moi une tomate, à la Chapelle de la Queste, à Grimaud, dans le Golfe de Saint-Tropez, organisée par l'association Je fais ma part 83, la même association qui a créé le potager participatif Oasis Esperanza, avec des stands, des animations, pour les adultes et les enfants, des conférences, des tables rondes, des rencontres, des ventes de miel, des échanges de semences, des papoti-papota, des rires, des bisous bisous et des bonnes choses à grignoter et à boire.

Tout cela me fait remonter à six ans en arrière. Nous sommes en septembre 2015. Je n'habite pas encore dans le Sud. Je vis à Paris, à Saint-Germain-des-Prés, mon quartier préféré et je viens de décider de vivre dix jours par mois à Saint-Tropez, seule, sans copine, sans mari. Juste moi et la mer. Je ne savais pas encore que la forêt et La Garde-Freinet allaient avoir raison de mon cœur au point de me faire déménager en avril 2022.

Avant ce fameux mois de septembre 2015 qui a fait basculer beaucoup de choses dans mon existence, lorsque je rentrais de Ramatuelle où je n'allais plus très souvent depuis le tournage du film Les randonneurs à Saint-Tropez que j'avais coécrit avec feu le scénariste Éric Assous et mon mari, Philippe Harel, qui l'a réalisé, je racontais à mes amis de Paris la douceur de l’eau, le sable de l’Escalet aussi blanc que celui des Maldives, le vert de toutes les vignes qui se marie si bien avec celui des pins, les sangliers qui détruisent les jardins, les amusants petits-déjeuners chez Sénéquier où l'on commence à deux et où l'on termine à quinze avec tous les copains des copains, les virées en voilier, les piques-niques en hélico, les soirées à danser, les délicieuses tartes tropéziennes de la boulangerie des Deux Frères, les restos dégueulasses où je vomis à chaque fois en sortant, le village de Saint-Tropez tellement ravissant qu'il devrait être classé patrimoine mondial par l'Unesco afin de mettre fin à toutes ces constructions d'immeubles horribles qui le défigurent, mais depuis mon dernier séjour où je suis venue passer une semaine seule début septembre à l'hôtel du Colombier et où je me suis régalée d'aller pieds-nus me baigner à la Ponche, je ne parle plus que d'agroécologie, de permaculture, de vers de terre, de pollinisation, de biodiversité, de semences reproductibles, de vision holistique, de cultures sur buttes, de composts ou de résilience écologique.

En effet, la veille de rentrer chez moi, je dîne avec un vieux pote à La Forge, un restaurant italien et ramatuellois (où je ne vomis pas... ) qui  me convainc de ne pas repartir tout de suite à Paris et m'invite à passer une semaine dans la propriété qu'il vient d'acheter. Il me dit que ça va m'amuser. J'accepte. Je change mes billets de TGV. Et hop ! Je me retrouve à dîner avec Paul Watson, pirate-fondateur de Sea-Shepherd, qui a dédié sa vie pour sauver des milliers de baleines, requins, tortues, phoques, dauphins, et dénoncer les dégâts de la pêche intensive. D'ailleurs, c'est simple, pour être embauché chez Sea-Shepherd, Paul demande au futur candidat s'il serait prêt à donner sa vie pour sauver une baleine. Si la réponse est non, exit. En revanche, si c'est oui, bienvenue dans ce monde de justiciers des mers !

Le lendemain matin, je suis réveillée par une centaine de bénévoles, au look gentiment baba-cool,  rien à voir avec ma bande bien coiffée de chez Sénéquier ou du Club 55, qui commencent à installer des stands, des toilettes et une cantine dans le jardin. En effet, tout cela est très amusant. Une Marie vient à ma rencontre et se présente, elle est présidente de l'association Colibris Golfe de Saint-Tropez qui fête ses 1 an et organise l'opération Dessine-moi une tomate, nom inspiré du Petit-Prince de Saint-Exupéry qui a grandi jusqu'à 5 ans dans ce domaine, peut-être même a-t-il dormi ou joué dans ma chambre ? La seule chose que je sais, c'est juste après le détour qu'il a fait en avion pour aller, comme à son habitude, faire trois ronds dans le ciel histoire de saluer sa maman, une autre Marie, revenue habiter dans cette maison, qu'il a été descendu quelques minutes plus tard au large des côtes marseillaises.

Durant deux jours, j'ai écouté, au milieu de plus de 2500 visiteurs, une dizaine de conférences au cours desquelles les intervenants tous aussi passionnants les uns que les autres ont raconté leurs expériences et leur combat pour un plus grand respect de la nature et de la terre. Émue et séduite, j'ai même failli acheter un poussin extraordinairement mignon issu d’une race de poule ancienne très jolie avec des grosses pattes exagérément fournies en plumes, mais malgré tout l'amour que j'aurais pu lui apporter, je n'ai pas sauté le pas, petit-poussin-devenu-grand aurait été malheureux sur mon balcon parisien.

Même si je suis très vigilante sur la provenance et la qualité de mon alimentation (je n’avale jamais de nourriture transformée et issue de l'industrie) et que dans mes romans, mes héroïnes militent toujours, à leur façon et avec leur dialectique, contre les dérives et les dangers des pesticides et les dramatiques techniques d'agriculture qui à force de rechercher une rentabilité uniquement financière ont épuisé nos sols et asséché nos nappes phréatiques, et ce au niveau mondial, durant ce week-end varois, j’ai beaucoup appris. J’ai appris, entre autres, que l’homme a besoin du ver de terre pour vivre mais que le ver de terre (mon nouveau héros) n’a pas besoin de l’homme, que les semences OGM sont un crime contre l'humanité, que le requin avec sa moyenne de dix morts par an est l’animal le moins meurtrier, en comparaison, le moustique en tue 830000, qu’un végétalien qui roule en voiture pollue moins qu’un carnivore qui circule à vélo, que 40% des poissons pêchés servent à nourrir d’autres animaux, que les cochons mangent plus de poissons que les requins, que 80 millions de requins sont tués chaque année, qu’une baleine défèque 3 tonnes de déchets par jour qui servent à nourrir le plancton, que 300000 baleines ont été décimées au XXème siècle, ce qui a entraîné une réduction de 50% du plancton.

Le soir de l'inauguration de ce premier Dessine-moi une tomate,  je suis littéralement séduite par la bienveillance et la volonté de tous ceux que je rencontre de préserver les ressources naturelles de notre planète. Conquise et émue, j'embrasse un tilleul bicentenaire pour le remercier d'être là, quand un monsieur que je connais vaguement, certainement attiré par le député et le nombre de maires de la région présents à cette manifestation, me demande en ricanant, un verre de vin rouge à la main, si je cautionne ce genre d’alimentation.

— C’est-à-dire ? je lui réponds.

— Allons, Sylvie, vous m’avez compris.

— Ben… non.

— Avouez quand même qu’ils sont très naïfs.

Préférant rester polie, réalisant que la conversation risque de devenir pénible et n'ayant aucune envie de perdre mon énergie et ma bonne humeur à essayer de le convaincre (pour certains, c'est peine perdue) en lui expliquant mon attirance pour ce nouveau monde de demain qui s'ouvre à moi avec ses connaissances et ses espoirs, je lui raconte l'histoire que Pierre Rabhi, inspirateur de cet événement, adore narrer : " Il était une fois un immense feu de forêt. Un tatou se moque d’un colibri qui porte de l’eau dans son  bec et s'évertue à la verser sur les flammes. Quand on connait la taille minuscule du colibri, on peut imaginer celle de son bec et celle de la goutte d'eau qu'il transporte. Pfut ! Ne te fatigue pas l’ami, dit le tatou. Ça ne sert à rien. Tu crois peut-être qu’avec tes quelques gouttes, tu vas arrêter l’incendie ? Je ne sais pas,  répond le colibri, mais je fais ma part !

Et comme je ne veux pas gâcher mon plaisir d’être là, j’adresse au monsieur ricaneur et pas gentil un joyeux sourire et je pars caresser un bébé oie qui ressemble étrangement à un canard.

Six ans plus tard, aujourd'hui, 1er septembre 2015, je téléphone à Marie, pas la maman d'Antoine de Saint-Exupéry, l'autre, celle de Dessine-moi une tomate..., je lui demande des informations avant de faire ma vidéo avec ma petite Marcelline, histoire d'annoncer cet événement annuel qui continue d'exister grâce aux bonnes volontés de tous ceux qui essayent de créer le monde demain, un monde de solidarité, d'échanges, de bon sens, de bienveillance, de légumes sans pesticides, de belles tomates, de soleil, de nature, d'amitiés, un monde qui est un peu loin de mes mondanités parisiennes que j'aime aussi et que je ne renie pas, un monde nouveau pour moi et qui prend de plus en plus de place dans mon cœur.

Sylvie Bourgeois Harel

Oasis Esperanza Jardin participatif et partagé de Je fais ma part à Grimaud - Sylvie Bourgeois Harel

Oasis Esperanza Jardin participatif et partagé de Je fais ma part à Grimaud - Sylvie Bourgeois Harel

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EN ATTENDANT QUE LES BEAUX JOURS REVIENNENT (roman que j'ai signé Cécile Harel)

... Sauf qu’un matin, il a plu. On a eu notre journée de congé. J’ai enfilé ma robe débardeur en daim beige avec mes bottes plates assorties, et je suis partie en stop à Sainte-Estelle voir ma mère. Elle me manquait. Une Rolls m’a pris. Il avait l’air gentil. À moins que ce soit la berline la cause de cette impression. Il y avait des embouteillages, alors il a bifurqué sur un petit chemin. On s’est retrouvé dans la campagne. Je ne me suis pas méfiée quand il m’a répété que j’étais jolie et qu’il aimerait m’offrir un grand coiffeur et des beaux habits. Mais quand il a fermé la voiture et s’est arrêté dans un terrain désert bordé d’arbres au dessus d’une colline, c’était trop tard. Je ne pouvais plus m’enfuir. Mon corps s’est glacé. L’effroi est revenu. C’était foutu. Je n’arrivais pas à crier. J’ai essayé de le taper, de lui échapper. J’ai tout tenté. Il ne m’a laissé aucune issue. Ce n’est pas vrai qu’on peut s’enfuir quand un homme est sur vous et qu’il vous tient et vous menace avec son couteau planté sous votre gorge. Et quand il vous donne des coups, et vous tire les cheveux, et vous tord les poignets, et vous colle contre lui pour vous maitriser et déchirer votre culotte, vous ne pouvez ni le mordre, ni le tuer. Quand il s’est enfoncé, je n’ai pu que haïr les hommes. Encore. Je me suis tellement débattue que j’ai réussi à ouvrir la porte. J’ai cru pouvoir décamper. Mais il m’a rattrapée et m’a collée la tête contre un arbre. Ma seule victoire a été qu’il n’arrive pas à éjaculer en moi. Ça l’a énervé. Il a hurlé que j’étais trop conne. Si j’avais été plus gentille, il aurait fait de moi la reine de Saint-Tropez. Je me suis sentie tellement sale que je n’ai pas noté son numéro d’immatriculation. Je ne l’ai pas dénoncé aux policiers non plus. Je n’en ai pas parlé. Le silence comme protection. Le silence en destruction. Le silence en négation. La douleur, de toute façon, je savais depuis longtemps comment l’anesthésier. Tout comme la jouissance d’ailleurs. Ça ne m’était jamais venu à l’esprit que mon vagin pouvait servir à me donner du plaisir. C’était ma boîte à secrets, fermé. Avec une clef d’effroi. Point. Ma boîte de Pandore. Inutile de l’ouvrir.

J’étais seule responsable du choix de ma si jolie robe en daim beige avec les bottes plates assorties. C’était écrit. Comme une continuité. À force de fuir ceux qui m’aimaient pour ne plus être aimée, je faisais de mon corps une victime toute tracée. Je suis rentrée à pied, en bus, je me suis lavée dans la mer, puis je suis allée chez Sénéquier m’acheter des brioches et des pains au chocolat et des tartes et des croissants pour me faire croire que c’était à cause de toutes ces pâtisseries que j’étais autant écœurée.

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  • : Sylvie Bourgeois fait son blog
  • : Sylvie Bourgeois Harel, écrivain, novelliste, scénariste, romancière Extrait de mes romans, nouvelles, articles sur la nature, la mer, mes amis, mes coups de cœur
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  • Sylvie Bourgeois Harel
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